Ecriture inclusive et communication
Sujet qui déchaine les passions, la question de l'adoption ou non de l'écriture inclusive n'est pas anodine lorsqu'on communique. Dans le camp des "pour" et celui des "contre", de nombreux arguments tiennent la route. Essayons d'y voir plus clair ensemble.
Qu'est-ce que l'écriture inclusive ?
Né de la volonté de faire changer les mentalités sur l’égalité homme/femme par le langage, le langage inclusif a pour objectif d'éviter toute discrimination pour motif de sexe, d'âge, d'origine ethnique ou d'orientation sexuelle. On parle d'écriture épicène, non-sexiste ou neutre pour toute pratique d'écriture visant à éviter toute discrimination sexiste. Par simplification, le terme d'écriture inclusive est utilisé principalement pour limiter l'exclusion de genre (féminin / masculin)
Il existe 4 grandes formes pour l’écriture inclusive :
- Le détournement de signes :
- Les parenthèses : pharmacien(ne)
- Le slash : pharmacien/ne
- Les tirets : pharmacien-ne
- Le point médian ou point du milieu : pharmacien·ne
- Le point : pharmacien.ne
- L’agglomérat (pour les formes en « eur »/ « ice ») : Acteurice, Agriculteurice, …
- L'énumération de tous les genres : "Elles et ils vont manger" ou "Les pharmaciens et les pharmaciennes..."
- La globalisation : l'équipe de la pharmacie
Ça se complique quand il y a le pluriel et pour l'accord du verbe.
A noter que la féminisation des noms de métiers, de fonctions, de titres et de grades a été acceptée en 2019 par l'académie française, pourtant encore hostile à l'écriture inclusive.
Si vous vous demandez comment écrire le point médian, sur Mac, il faut taper alt+maj+f et sur PC, alt+0183.
Pourquoi utiliser l'écriture inclusive ? Les pour
Nous avons tous appris très tôt qu'en français, lorsqu'on évoque un groupe d'individus féminins et masculins, pour simplifier, on met tout au masculin et on accorde le verbe avec le masculin, même s'il est minoritaire en nombre. Des études ont démontré que cette masculinisation systématique et générique du français aurait des impacts négatifs sur la psychologie et contribuerait à invisibiliser les femmes dans la société. Il s'agit donc d'un enjeu d'égalité femmes-hommes.
Dans une société où cette égalité est encore mise à mal et souvent remise en cause, tout effort qui vise à améliorer la position des femmes n'est pas à négliger.
Faire le choix de l'écriture inclusive est un acte fort qui vise à afficher clairement votre volonté d'éviter toute discrimination sexiste.
Faut-il éviter l'écriture inclusive ? Les contre
Une inclusion pas si inclusive
C'est un des plus forts arguments en défaveur de l'écriture inclusive : la complexification d'écriture nuit à la fluidité de lecture et donc défavorise les personnes ayant des difficultés de lecture comme les dyslexiques. Les déficients visuels, notamment ceux qui utilisent des navigateurs à traduction vocale sont lourdement pénalisés car à ce jour, ces outils ont des difficultés à interpréter ces signes. Cette forme d'écriture est également un frein pour les étrangers qui ne maîtrisent pas totalement le français.
Au nom de l'inclusion, cette utilisation en devient excluante pour une partie de la population. Dommage.
Il faut reconnaitre que même si on n'a pas de difficultés particulière cette forme d'écriture n'est pas très fluide à lire.
Attention, ceci est vrai principalement pour les formes d'écriture utilisant des signes comme le slash, le point, le tiret, le point médian ou les parenthèses. Adopter une formulation plus neutre, plus générique ou énumérer les genres ne pose aucun problème à ce niveau !
Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain ! Ce n'est pas l'écriture inclusive qui pose un problème mais comment on l'applique.
Si comme nous vous êtes sensibles à l'accessibilité pour tous (pour le web mais pas seulement), restez vigilants. Nous vous donnons des conseils plus bas.
Un frein pour le référencement ou SEO
Si vous adoptez une écriture inclusive par militantisme (c'est bien), attention si vous écrivez pour le web ET que vous avez des objectifs de visibilité sur les moteurs de recherche (SEO).
Explications. Le référencement naturel (SEO ou Search Engine Optimization) sur les principaux moteurs de recherche repose sur les requêtes des internautes. Pour qu’un texte attire du trafic sur votre site internet, il faut qu’il apporte des réponses à une “requête” recherchée.
Google par exemple va rechercher dans ses résultats indexés les contenus des pages qui répondent le mieux à cette requête en cherchant des analogies de mots : si le mot écrit dans la page cible est identique au mot écrit par l'internaute, il sera considéré comme pouvant faire partie des résultats. Google va plus loin car il est capable de considérer un mot appartenant au champ sémantique du mot recherché comme pertinent (pluriel, synonyme, ...). Selon le ou les mots écrits dans la requête, les résultats proposés par le moteur de recherche seront différents.
Ainsi, si vous recherchez "entrepreneur", "entrepreneure", "entrepreneuse" ou "entrepreneur·e" dans Google, les résultats proposés seront différents. Faites le test. Google interprète très bien à ce jour le point médian mais selon plusieurs tests, il vaut mieux éviter l'écriture utilisant des signes et plutôt utiliser là aussi une formulation plus neutre ou multiplier les termes.
5 conseils pour écrire de façon inclusive
Vous l'aurez compris, le choix n'est pas simple. Niveau égalité femme-homme, le sujet ne fait pas débat : à notre avis, l'écriture inclusive est une belle avancée. Comme tous les progrès, il fait grincer des dents et n'est pas simple à appliquer. Ce n'est d'autant pas simple que rien n'est figé, qu'il existe plusieurs formes et règles et enfin que des institutions comme l'académie française s'y opposent.
L'avantage aujourd'hui est qu'il y a plusieurs règles applicables et que vous pouvez choisir parmi ces règles celles qui vous conviennent le mieux.
Si vous souhaitez inclure l’ensemble de vos lectrices et de vos lecteurs dans vos documents, votre site web et plus globalement dans l’ensemble de vos créations de contenu, voici quelques conseils.
Éviter les signes
Parmi les formes d’écriture inclusive, évitez celles utilisant des signes (parenthèses, slash, tiret, point du bas et point médian). Par exemple, le point médian et le tiret sont considérés comme des espaces par Google. Ainsi, si votre mot-clé principal est pharmacien·ne, vous risquez de ne ressortir que sur le terme pharmacien.
Second inconvénient du point médian : son utilisation nécessite de connaître les raccourcis clavier : alt+maj+f sur Mac et alt+0183 sur PC. Rare sont les utilisatrices et les utilisateurs qui l’utilisent lors de leur recherche.
Freinant la lecture, l'écriture inclusive par signes n'est pas plus recommandée pour les supports imprimés que pour le web. A n'utiliser que si c'est impossible de faire autrement et préférez le point milieu aux slashs, tirets et parenthèses : ces typographies gênent davantage la lecture, notamment pour les personnes handicapées, dyslexiques ou dysorthographiques.
Éviter l'agglomérat
En faisant un test dans votre moteur de recherche avec des mots comme agriculteurice, ne vous proposera que des résultats où le terme précis est mentionné, mais vous suggéra même d’essayer avec une orthographe genrée. Vous aurez certes moins de concurrence mais comme pour le point médian, il y a fort à parier que peu d'internautes (< vous voyez comment on peut neutraliser le genre facilement ?) l'utiliseront pour leur requête ... et vous passerez à côté de vos objectifs.
Les mots nouveaux comme ceux-ci peuvent également freiner la lecture sur des supports hors web. Est-ce qu'il faut dans ce cas privilégier le point médian ? Nous n'avons pas trouvé d'étude à ce sujet. A tester au cas par cas et à n'utiliser encore une fois qu'en dernier recours.
Privilégier des mots génériques ou neutres
L’utilisation de termes génériques permet d’éviter toutes formes de distinction. De plus, ils ont l’avantage de fluidifier la lecture par rapport aux barres de fraction ou aux tirets qui ont tendance à alourdir le contenu éditorial et nuire à l’expérience utilisateur.
Par exemple, préférez "les membres de l’équipe" à "les salariés et les salariées" ou "la clientèle" à "les clients et clientes".
Si c’est pertinent, utiliser des mots neutres épicènes comme "partenaire", "membre", "internaute", "humain"…, et doublez l’article "la" et "le" quand cela est nécessaire.
Énumérer et doubler les mots
Citez à la fois le féminin et le masculin : "la pharmacienne et le pharmacien". Dans ce cas, pour éviter de privilégier un genre plutôt qu'un autre, certains recommandent d'opter pour un ordre alphabétique : "femmes et hommes", "pharmacien et pharmaciennes". Une fois qu'on adopte une règle on s'y tient ;-)
Si possible, utilisez d'autres règles grammaticales que la problématique et récente « le masculin l’emporte sur le féminin ». Elles existent mais ont été évincées par cette dernière :
- L’accord majoritaire : l’accord se fait avec le genre le plus représenté dans le groupe. Par exemple : "notre équipe comprend trois pharmaciennes et deux pharmaciens expérimentées. "
- L’accord de proximité : l’accord se fait avec le terme le plus proche. Par exemple : "des pharmaciens et des pharmaciennes motivées."
Si vous n’avez pas d’accord à faire ou dans une énumération, utilisez l’ordre alphanumérique. Comme dans l’exemple 'l’égalité femmes-hommes'.
Réserver l’écriture inclusive au corps de texte
Sur le web, si vous utilisez des signes ou des agglomérats, réservez l'écriture inclusive au corps du texte.
Par contre, dans ce cas elle est à proscrire de votre méta-description, de vos titres et de vos sous-titres (H1, H2…). Ces différentes balises sont très importantes pour votre référencement SEO et vous risqueriez d’être pénalisé. Bannissez-la aussi de vos URLs car elle risque de générer des erreurs et de vos balises alternatives destinées aux malvoyants.
Notre avis, en conclusion
Communication, écriture inclusive et SEO ne sont pas incompatibles mais nécessitent volonté et persévérance.
La rédaction de contenus peut devenir plus longue, plus réfléchie et le travail de relecture est encore plus important si vous voulez obtenir des contenus de qualité non discriminants et optimisés.
La non-discrimination (sexiste, religieuse, ...) est un sujet important pour une société plus équitable. Il mérite un effort supplémentaire surtout quand des vents contraires vous incitent à baisser les bras et que les habitudes sont fortement ancrées.
Si vous avez besoin d'aide, n'hésitez pas à nous contacter !